Reviel Netz / William Noel / Nigel Wilson et al. (eds.): The Archimedes Palimpsest. 2 Volume Set, Cambridge: Cambridge University Press 2011, VII + 342; IX + 345 S., Volume I: Catalogue and Commentary
Volume II: Images and Transcriptions
durchgehend farbig bebildert, ISBN 978-1-1070-1684-2, USD 240,00
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Dominic J. O'Meara: Platonopolis. Platonic Political Philosophy in Late Antiquity, Oxford: Clarendon Press 2003
On connaît sous le nom de palimpseste d'Archimède un livre de prière (euchologion) d'époque byzantine copié au XIIe ou XIIIe siècle en se servant de plusieurs folios de manuscrits plus anciens dont l'écriture avait été effacée afin de pouvoir réutiliser le parchemin. Un de ces manuscrits (datant probablement du troisième quart du Xe siècle) contenait sept traités d'Archimède de Syracuse (287-212 av. J.-C.).
Le codex, originaire de Palestine, était conservé au Metochion du Saint Sépulcre à Constantinople (Ms. 355). Papadopoulos-Kerameus y avait repéré la présence des textes palimpsestes en rédigeant le catalogue des manuscrits du Metochion (1899); le philologue danois Johan Ludvig Heiberg y avait reconnu des traces de plusieurs traités d'Archimède et avait utilisé ce témoin (indiqué par le sigle C) pour sa deuxième édition des œuvres du mathématicien (1910-1915). Le manuscrit disparut ensuite de Constantinople dans des circonstances pas très claires pour réapparaître après la deuxième Guerre Mondiale dans une collection privée française ayant perdu quelques folios, enrichi de quatre fausses images et très abimé par l'humidité. Il a été mis en vente aux enchères chez Christie's en octobre 1998 et acheté par un collectionneur anonyme américain qui mit le document à la disposition du public savant en le confiant en 1999 au Walters Art Gallery (aujourd'hui Museum) de Baltimore. Un cahier du manuscrit est conservé à Cambridge (UL, Add. MS 1879.23). Dans les années suivantes, un groupe de chercheurs a essayé avec succès de déchiffrer l'écriture des couches inférieures du manuscrit afin de récupérer le plus possible de l'œuvre d'Archimède qui se cachait sous le texte de l'euchologion. Les résultats ont dépassé toute attente. On a réussi, grâce à l'application méthodique de nouvelles technologies de photographie et d'informatique, et avec l'aide de plusieurs spécialistes dans différents domaines des sciences, à rendre lisible une très grande partie de la scriptio inferior; on s'est alors rendu compte que ce codex était en réalité composé de différentes unités et qu'il ne transmettait pas seulement les sept traités d'Archimède, mais aussi d'importants restes de deux discours inconnus d'Hypéride (codex datant peut-être de la deuxième moité du XIe siècle), d'un commentaire aux Catégories d'Aristote (peut-être celui d'Alexandre d'Aphrodise, peut-être l'Ad Gedalium de Porphyre; le codex date de la fin du IXe-début du Xe siècle), d'un texte agiographique (milieu-fin du XIe siècle), d'un Menaion (XIe-début du XIIe siècle), ainsi que de quelques pages de deux textes grecs non identifiés.
Les deux volumes de The Archimedes Palimpsest donnent une première vue d'ensemble concrète du travail de plusieurs décennies sur ces documents difficiles mais fascinants, et des résultats surprentants qui en ont découlé.
Le premier volume contient (précédée d'une introduction de W. Noel, 1-15) une description codicologique des manuscrits qui forment le palimpseste d'Archimède: celui de l'Euchologion, ceux des traités d'Archimède, des discours d'Hypéride, du Commentaire à Aristote, et des autres textes (17-77). Un compte rendu détaillé des différentes phases de l'histoire de ces reliquats suit (81-127): A. Quandt, The Making of the Euchologion; J. Lowden, The Strange and Eventfull History of the Archimedes Palimpsest; E. Petersen, Itinera Archimedea: On Heiberg in Constantinople and Archimedes in Copenhagen. Les chapitres restants sont consacrés aux problèmes de conservation (129-171) et au processus de digitalisation du palimpseste (175-239): A. Quandt, Conserving the Archimedes Palimpsest; W.A. Christens-Barry, R.L. Easton Jr., K.T. Knox, Imaging and Image-Processing Techniques; U. Bergmann, Imaging with X-Ray Fluorescence; D. Emery, A. Lee, M.B Toth, The Palimpsest Data Set. La dernière partie (243-320) du volume présente un aperçu des recherches sur les palimpsestes et une description exhaustive du contenu des textes cachés sous l'euchologion (N. Tchernetska and N. Wilson, The Palimpsest in Context) ainsi qu'une étude approfondie de l'apport du codex C à la constitutio textus des œuvres d'Archimède et à la reconstruction de sa doctrine (R. Netz, The Place of Codex C in Archimedean Scholarship). Un Appendice suit avec une 'Concordance of Foliations' (321-325) ainsi qu'une liste des Contributeurs (326), une bibliographie (327-330) et un index général (331-340).
Les hellénistes et les chercheurs en mathématiques antiques trouveront dans le deuxième volume un outil d'une extrême valeur: la transcription complète, accompagnée d'excellentes photographies, des trois textes les plus consistants (Archimède, Hypéride et le Commentaire à Aristote) qu'on ait réussi à lire dans la scriptio inferior des différents manuscrits réutilisés pour la confection de l'euchologion.
Les éditeurs ont décidé de reproduire les images de chaque folio en choisissant parmi toutes les images disponibles celles qu'ils ont pensé être les plus utiles (dans le cas où un ou plusieurs folios du manuscrit sont aujourd'hui perdus, on a reproduit les photographies qui avaient été tirées pour Heiberg en 1906). Mais on trouve dans un Appendice (341-344) une liste exhaustive de toutes les images disponibles dans l' 'Archimedes Palimpsest data set' (accessible à l'adresse web suivante: http://archimedespalimpsest.net).
Les œuvres d'Archimède transmises par C sont les suivantes: L'équilibre des figures planes (en deux livres); Les corps flottants (en deux livres. Seule copie connue en grec; auparavant on disposait de la traduction latine de Guillaume de Moerbeke); La méthode (seule copie connue); Spirales; La sphère et du cylindre (en deux livres); La mesure du cercle et le Stomachion (seule copie connue). On conserve en outre les restes des deux discours d'Hypéride Contre Diondas et Contre Timandros. La portion conservée du commentaire à Aristote discute de Catégories 1a20-b15.
Les critères suivis dans la transcription des textes du palimpseste sont exposés avec clarté dans les pages de la préface (vii-ix). J'en résume les plus importantes relatives aux textes d'Archimède. La transcription a été faite sur la base du codex C; les lectures de Heiberg ont été déduites à partir de son édition; les diagrammes ont été transcrits en principe sans interventions éditoriales; il y a aussi un apparat dans lequel les éditeurs ont répertorié, en particulier, les divergences avec la transcription de Heiberg, qui n'est pas le texte imprimé par ce savant, mais les leçons dont on peut supposer qu'il les avait lues dans le manuscrit.
C'est à partir de ces transcriptions (en cherchant éventuellement à en améliorer ici et là la lecture et surtout en opérant ope ingenii) que les savants peuvent maintenant travailler à une nouvelle édition des œuvres d'Archimède qui remplacerait celle (méritoire en plusieurs aspects) de Heiberg; à rendre accessibles les deux nouveaux discours d'Hypéride et les restes plus abîmés du commentaire à Aristote.
Je n'ai qu'un regret: celui de ne pas pouvoir rendre compte de façon plus détaillée de toutes les données que ces deux magnifiques volumes nous apportent.
Tiziano Dorandi