Rezension über:

Janett Schröder: Die Polis als Sieger. Kriegsdenkmäler im archaisch-klassischen Griechenland (= KLIO. Beiträge zur Alten Geschichte. Beihefte. Neue Folge; Bd. 32), Berlin: de Gruyter 2020, X + 342 S., 12 s/w-Abb., 22 Tbl., ISBN 978-3-11-062604-9, EUR 99,95
Inhaltsverzeichnis dieses Buches
Buch im KVK suchen

Rezension von:
Anne Jacquemin
Université de Strasbourg
Redaktionelle Betreuung:
Matthias Haake
Empfohlene Zitierweise:
Anne Jacquemin: Rezension von: Janett Schröder: Die Polis als Sieger. Kriegsdenkmäler im archaisch-klassischen Griechenland, Berlin: de Gruyter 2020, in: sehepunkte 21 (2021), Nr. 6 [15.06.2021], URL: https://www.sehepunkte.de
/2021/06/33927.html


Bitte geben Sie beim Zitieren dieser Rezension die exakte URL und das Datum Ihres Besuchs dieser Online-Adresse an.

Janett Schröder: Die Polis als Sieger

Textgröße: A A A

Après avoir lu cette thèse soutenue à Berne en 2017, on peut s'interroger sur la pertinence du titre: parler de «la cité comme vainqueur» imposerait une sélection impossible de fait au Demosion Sema d'Athènes où la cité honore tous les morts au combat et l'exclusion du tombeau des Thébains à Chéronée. Die Polis als Kämpfer conviendrait mieux pour ce livre, ce que laisse entendre le sous-titre où figure Kriegsdenkmäler et non Siegesdenkmäler.

Après une introduction qui pose les termes du sujet et le situe dans l'histoire de la recherche (23) se succèdent trois parties: la politisation du souvenir à l'époque archaïque (78), la conscience de soi de la communauté civique au premier âge classique (98), la monumentalisation de la victoire au IVe s. (63). La conclusion (11) est suivie d'un excursus sur Pausanias (23), d'une bibliographie (22) citant les éditions et les traductions utilisées, les commentaires en allemand, anglais et grec moderne, ainsi que la littérature secondaire (près de 400 titres), et d'un index (8) recensant thèmes, noms de lieux et de personnes.

La thèse de J. Schröder se place dans la longue liste des travaux sur la mémoire collective inaugurée par M. Halbwachs et A. Warburg et revitalisée par P. Nora et J. Assmann. La période de référence va de ca 750 à 338. L'aire se limite à la Grèce centrale et au Péloponnèse (14), ce qui n'empêche pas les allusions à l'Italie du sud et à la Sicile. Les sources littéraires sont les historiens classiques et post-classiques ainsi que Pausanias. La documentation archéologique provient surtout de Delphes et d'Olympie (19): comme le nombre d'armes trouvées à Olympie s'explique par la fouille du stade et que le dromos pythique antérieur au IIIe s. demeure inconnu, il faut être prudent dans les conclusions sur la faible présence des armes à Delphes (154).

La première partie commence par l'étude de la consécration d'armes. La mise en relation de cet usage avec la formule do ut des fait problème, car l'offrande de butin suppose une intervention divine, certes il peut y avoir eu un vœu, mais la divinité est alors contrainte à agir avant d'avoir reçu un don. La réutilisation du matériel de guerre comme tel devait être plus fréquente qu'il n'est affirmé page 56. À propos de la transformation du butin en monuments, J. Schröder s'intéresse particulièrement au trésor des Athéniens à Delphes (60-62): il est dommage qu'elle ne s'exprime pas plus clairement sur le rapport entre l'édifice et la base au sud et ne cite pas A. E. Raubitschek. Le trésor de Thèbes dépourvu de colonnes ne peut être construit «in der traditionellen Form dorischer Antentempel» (63). Pour les consécrations des Phocidiens à Delphes et à Abai (50-51, 71, 81-85), les apports récents des fouilles et des études relatives au site de Kalapodi auraient été utiles. [1] À propos de la fondation de cultes liés à des guerres, la confusion (85) entre Tégée et Tanagra rend le développement peu compréhensible. En revanche, la question de l'existence de trophées à l'époque archaïque est bien posée, comme celle des funérailles des morts au combat.

La deuxième partie porte surtout sur les guerres médiques. Comme le thème dominant est celui de la conscience que les communautés civiques ont d'elles-mêmes, les fêtes de victoires tiennent une place importante, dans la perspective tracée par J. Assmann. J. Schröder distingue l'instauration de fêtes mémorielles pour des dieux ou des héros déjà honorés et la fondation de nouveaux cultes. L'importance des épiclèses d'Eleutherios et de Soter est bien vue, ainsi que leur plasticité qui permet leur usage en politique extérieure comme intérieure. Le deuxième thème abordé, les offrandes monumentales, distingue les consécrations dans les sanctuaires panhelléniques et locaux. Les offrandes d'armes et de navires, des statues, des bâtiments (138), sont liées pour les deux tiers aux guerres médiques. La référence (141, n. 581) à É. Bourguet, FD III 1, 2 doit être supprimée: pour lui, il s'agit du taureau de Corcyre, et non de l'Apollon de Salamine.

Les exemples retenus à propos de la notion d'espace public conduisent à s'interroger sur la possibilité de célébrations qui seraient «profanes» (153-164). L'espace de l'agora s'oppose-t-il vraiment à celui de l'acropole dans une opposition sacré/profane? Le politique peut-il se séparer du sacré? Les conclusions relatives au tombeau que Sp. Marinatos attribue aux Platéens (169 et 295) auraient pu être plus fermes. Les guerres médiques représentent un tournant dans les pratiques mémorielles, que ce soit dans le traitement collectif des morts ou dans le trophée, intouchable, mais éphémère symbole de la victoire.

La troisième partie, la «monumentalisation» de la victoire, aborde les thèmes des honneurs aux morts à la guerre et des monuments commémoratifs, en inversant l'ordre suivi dans les deux premières parties. Le premier thème a déjà été traité dans de nombreux travaux, essentiellement dans une perspective athénienne. Dans ce long développement, J. Schröder expose bien le choix entre enterrement sur le lieu du combat, avec éventuellement un cénotaphe dans la patrie, et rapatriement des restes, le plus souvent après crémation et pose la question des célébrations privées à côté des rites publics. Il convient de signaler que dans l'onomastique grecque (215) on ne peut parler de prénom (Vorname). Les disparus au sens strict ne sont pas évoqués par une onzième urne (216), mais par un lit vide (κλίνη κενή), symbole beaucoup plus clair: la forme et la matière suggérée par le nom d'urne ne correspondent pas vraiment à celles des λάρνακες κυπαρίσσιναι (coffres de cyprès, bois imputrescible). J. Schröder étudie la diffusion de l'usage attique en citant listes de morts et règlements relatifs aux funérailles provenant d'autres cités.

Le thème du souvenir des guerres dans l'espace civique assure la transition avec la dernière partie dédiée aux monuments de victoire élevés dans le cadre des luttes pour l'hégémonie. Si la deuxième partie concernait une époque marquée par des luttes contre des barbares, la troisième aborde la célébration de combats où les deux adversaires sont grecs: les vainqueurs érigent de plus en plus souvent des trophées éphémères, mais commencent aussi à transformer cette structure en un monument pérenne. Les consécrations dans les sanctuaires panhelléniques continuent une tradition, en jouant, puisque l'espace libre se restreint, sur la confrontation. Cette troisième partie s'achève sur des monuments élevés à la veille de l'époque hellénistique.

La conclusion présente une brève histoire des monuments liés à la guerre. Il aurait été bon (268-269) de rappeler que les rares offrandes monumentales non royales et qui ne soient pas en relation avec l'invasion galate de 279/8 sont dues aux confédérations étolienne et achéenne, des États qui témoignent eux aussi d'un changement d'échelle. La seconde partie de la conclusion qui entend illustrer le titre de l'ouvrage rappelle à juste titre que les monuments de guerre archaïques et classiques sont dédiés par des communautés civiques qui se désignent par leur ethnique au masculin pluriel et non par la formule avec δῆμος qui apparaît à la fin du IVe siècle et est concurrencée à l'époque hellénistique par la variante avec π?λις. Si J. Schröder montre bien l'importance des différentes formes de commémoration dans la constitution d'une identité civique, il aurait été intéressant de rappeler que la célébration peut inclure la défaite.

L'excursus final entend montrer l'importance de Pausanias pour le sujet, en le situant dans le contexte de la Seconde Sophistique. J. Schröder le teste dans trois domaines, les monuments des guerres médiques, ceux du Demosion Sema et ceux de la cité de Platées. Le lecteur peut s'interroger cependant sur la présence de cet excursus qui aurait pu donner matière à des articles, mais qui fait parfois double emploi avec les exposés du corps de l'ouvrage. La bibliographie témoigne du sérieux du travail. On signalera que le Guide de Delphes de J.-Fr. Bommelaer a fait l'objet d'une seconde édition revue en 2015. [2]

L'ouvrage est soigné: ainsi les erreurs sur les accents grecs sont peu nombreuses comme les fautes de transcription de noms grecs. Les tableaux de présentation des objets (monuments, fêtes ...) qui sont discutés ensuite sont clairs et utiles pour un lecteur qui ne serait pas familier avec le sujet.

On peut s'interroger cependant sur la pertinence des images: le livre n'est pas une étude de matériel comme celui de H. Baitinger, Waffenweihungen in griechischen Heiligtümern, Mayence, 2011, à la splendide illustration au trait. Comme le papier utilisé se prête mal à la reproduction de photographies et que ces dernières représentent des monuments bien connus, à une exception (211 fig. 10), l'ouvrage aurait pu s'en passer sans nuire à son intérêt.


Notes:

[1] S. Prignitz, ZPE 189 [2014], 139-146; W.-D. Heilmeier: Zur Identifizierung des Heiligtums von Abai/Kalapodi, Wiesbaden, 2016.

[2] On ajoutera, outre les travaux sur Kalapodi/Abai signalés plus haut, l'article de H. Frielinghaus «Die Helme von Delphi », BCH 131 (2007), 139-185.

Anne Jacquemin